On dit que l'habit ne fait pas le moine. C'est souvent vrai. Mais dans le monde dans lequel nous vivons, l'apparence physique possède une place très importante, si bien que le grec ne vas pas échapper à la règle. Vous voulez savoir à quoi il ressemble ? Très bien. Contrairement aux statues antique de marbre blanc, qui se tiennent bien droite, la tête haute, le grec est plutôt affalé. Certes, c'est un grand garçon, bien constitué, mais sa démarche est nonchalante, son dos semble supporter tout les malheurs du monde et son regard manque cruellement de motivation.

Pour entrer dans les détails, il a une tête. Bien remplie, nous verrons cela plus tard. Cette tête est fixée au reste de son corps. Un corps avec quelques cicatrices dans le dos, plutôt solide, voir musclé si l'on fait abstraction de cette impression de mollesse qui englobe le grec. Il a deux jambes qui lui servent à tenir debout et à se déplacer. Lentement, certes. Mais méfiez-vous de l'eau qui dort, le grec a de très bons réflexes. Cependant, le moindre effort semble être une épreuve des Jeux Olympiques pour lui et il ne refuse jamais le confort d'un bon fauteuil ou d'un lit. Voir du sol, s'il est vraiment fatigué.

Il a deux bras aussi, dont l'extrémité est terminée par deux mains, avec dix doigts en tout. Des bras forts, sculptés par le travail de la terre. Monsieur fouille dans les ruines de l'Ancienne Grèce pendant son temps libre.

Mais revenons à sa tête, à ce visage impassible encadré d'une tignasse brune indescriptible. Il n'a pas l'air bien réveillé, il doit mal dormir la nuit. Son regard vert émeraude semble ailleurs, comme s'il voyait le monde d'une autre façon. Une façon plus philosophique, sans doute.

A première vu le grec est un jeune calme, plutôt posé -voir affalé sur un canapé ou allongé par terre. C'est un penseur. Le genre d'homme qui préfère de longues réflexions aux actions faites sur un coup de tête. D'ailleurs, ce n'est pas un garçon colérique ou impulsif. Il prends son temps et savoir chaque minute que la vie à lui offrir. Elle est si courte, autant en profiter, non ?

La philosophie occupe une bonne partie de l'esprit grec. Avec les chats. Car on ne peut pas parler du méditerranéen sans parler des chats. Il voue un véritable culte à ces petits félins. Avec l'art et la philosophie, évidement, c'est un héritage de sa défunte mère. C'est un jeune homme curieux, ouvert d'esprit et à l'écoute des autres. Il aime découvrir le monde qui l'entoure, ainsi que les balades au clair de lune.

Herakles est quelqu'un qui aime profiter de la vie et qui sait s'arrêter pour observer les étoiles. Est-ce un rêveur ? Sans doute, oui. Il aurait aimé être un chat pour échapper aux problèmes de ce monde -et passer le plus clair de son temps à dormir, ne nous mentons pas. Avec l'arrivée des mutations et des problèmes qui ont suivi, le méditerranéenne est devenu plus réaliste, presque fataliste, résigné.

Sa façon de voir le monde a changé en même temps que ce dernier. Les questions sur le but de l'existence, le sens de la vie le tracassent, pire, le hantent. Qu'est-ce que le bien, qu'est-ce que le mal ? Tout est remit en question pour le grec.

Plus fatigué que jamais, il n'arrive cependant plus à trouver le sommeil et la sieste qu'il affectionnait tant n'est plus qu'un lointain souvenir. Il se questionne sur tout ce qu'il tenait pour acquis, se referme sur lui-même et cache ses malheurs au fond de son cœur. L'heure n'est plus à la réflexion et il le sait: il faut survivre.

Aurais-je été heureux si j'avais été un chat ?

J'en doute.

Je n'aurais pas d'obligations, pas de responsabilités accablantes. Je n'aurais que cet instinct animal, me forçant à remplir quelques besoins essentiels à ma survie. Chasser et bien manger pour pouvoir avancer. Dormir et me reposer pour pouvoir avancer. Avancer pour pouvoir survivre.

Finies les pensées philosophiques qui hantent mon esprit, finis les regrets qui m'empêchent d'aller de l'avant. La peur, elle, resterait par contre. Mais elle ne serait qu'un outil, qu'une arme pour survivre et éviter les dangers. Et Dieu sait qu'ils sont nombreux aujourd'hui...

Serais-je heureux sans tout cela ? Peut-être. Les chats sont-ils heureux ? Personne ne le sait vraiment. Ou alors ils n'en ont pas conscience. Beaucoup disent qu'ils n'ont pas d'intelligence, car ce ne sont que des animaux. Pourtant, ils n'ont pas détruit le monde dans lequel nous vivons. Pas comme les hommes et les nations l'on fait.


« Mαμά... Tu me racontes encore une histoire avant de dormir...?

-D'accord mon chaton, mais ce sera la dernière. Je vais te raconter l'histoire de Prométhée. »


Cette histoire, Mαμά me la racontait souvent. Un mythe simple en apparence mais qui cache deux facettes. La première est évidente. Une divinité, contre l'avis des autres, vole le Feu sacré de l'Olympe, ce symbole de connaissance et l'apporte aux Hommes. Ce qui leur permet de s'instruire et de s'améliorer. Mais c'est aussi évocateur de l'hybris, la folle démesure et l'orgueil qui rongent les Hommes, les poussant à défier les Dieux pour tenter de les surpasser.

Les mutations, ces dons du ciel. Nous aurions du faire attention, nous aurions du rester modeste. Maintenant nous on payons les conséquences.

Une vague vint se briser contre la coque, faisant tanguer le navire dans lequel je me suis réfugié. On raconte que l'Italie est un endroit sûr. Qu'il y a des survivants. Alors je n'ai pas hésité une seconde. C'est un long voyage de presque une journée qui m'attends, peut-être plus si les dieux anciens sont contre moi. J'ai pourtant fait attention à ne pas les offenser.

Ma main se glisse dans la poche de mon pantalon et vient jouer avec les perles de mon bracelet porte-bonheur. Il sert à éloigner le mauvais-œil et tout autre chose maléfique. J'en ai bien besoin en ce moment... Mon regard se perd loin à l'horizon. On ne peut plus voir la côte à présent. La Grèce est si loin et même si elle reste dans mon cœur, ce n'est pas sans regret que je l'abandonne.

Un bon représentant aurait-il fuit sa terre juste parce qu'elle est dévastée, invivable, dangereuse ? Les gens sont devenus fous, incontrôlables. La peur les fait agir comme des  sauvages, la faim les rende violent. Ils s'entre-tuent pour un bout de pain, pour un peu d'eau. Jamais je n'avais vu mon pays dans un état aussi catastrophique. Et il y a ces monstres assoiffés de sang, ces mutants. Créatures des enfers. Elle ravage tout, n'ont aucune pitié. Comment en sommes nous arrivé là ?

Je me demande ce que tu aurais fait à ma place, Mαμά? J'ai attendu, le plus longtemps que je le pouvais. Aidant les grecs. Priant sans cesse. Guettant une lueur d'espoir.

C'est ce que j'avais cru au départ. Que les mutations étaient une lueur d'espoir. La Grèce avait depuis longtemps perdu sa grandeur, elle était rongée par la crise économique, entre autres. En quoi une mutation aurait pu nous aidé ? Je ne sais pas vraiment. Je voulais juste le bonheur de mon peuple. J'ai longtemps pesé le pour et le contre, mais voyant que tout le monde s'y mettait et que les résultats semblaient positifs, le gouvernement a suivi le mouvement. Je n'avais plus qu'à taire mes doutes et accepter ces mutations. Pour le bien de mon peuple..., c'est ce qu'ils disaient.

La mienne n'était pas trop mal, un peu gênante pour dormir, surtout maintenant. J'entends les cris, les pleurs, les gémissements de douleur. Plus fort qu'avant. Plus présent qu'avant. Constamment. Je n'ai plus envie de dormir à présent. Trop peur de ne pas me réveiller.

Le vent se lève sur la Méditerranée et siffle dans mes oreilles. C'est en grimaçant que je réajuste le col de ma veste, laissant échapper un soupir.

Ce n'est pas la meilleure période de l'année pour partir en mer. J'aurait pu attendre le printemps, mais nous commencions à manquer de vivre et de temps. Notre cachette n'était pas des plus sûres et ces monstres ont fini par nous trouver. Et même si je les ai entendu arriver, nous ne fûmes pas assez rapide. Et j'ai fuis. Laissant tomber ma raison, n'écoutant plus que mon instinct, cette petite voix qui hurle au fond de moi: survis!

J'aurais peut-être dû réfléchir, comme d'habitude. Cela m'aurait peut-être coûté la vie. Mais les Anciens se seraient battu jusqu'à la mort pour protéger leurs terres. Je leur fais honte. Je me fais honte. Je suis plus à la hauteur de ce titre de nation.

La peur me ronge. Oui, je n'ai pas honte de l'avouer. Ce n'est pas une mauvaise chose en sommes, elle nous permet à tous de survivre. Dans ce genre de crise, il n'y a plus de pauvres ou de riches, d'hommes ou de femmes, d'humains ou de nations. Juste des animaux qui veulent survivre.

Combien sommes-nous encore en vie ? Je ne le sais pas. Combien de temps pourrons-nous survivre dans ces conditions ? Je ne sais pas. Je ne souhaite même pas ce que nous subissons arrive à mon pire ennemi. Même Turquie ne mérite pas tout cela.